lundi 8 juillet 2013

Les trésors de la Maronite





Il y a encore un an, la quiétude de la librairie des Maronites était brusquement brisée lorsqu’une nuée de gamins investissait l’espace entre la photocopieuse et collaient leur nez devant la caisse aux trésors, des tiroirs en plastiques remplis de bonbons Haribo. Puis, dans un silence presque complet, ils attendaient leur tour, un œil rivé sur les adultes patientant devant la caisse et, de l’autre, comptant et recomptant les pièces que les plus grands d’entre eux tenaient entre leurs doigts. Aujourd’hui, mauvaise nouvelle pour ces titis du XXIe siècle : c’en est fini des bonbons. « Je n’ai plus de bonbons car je n’arrivais pas à tout faire, tout simplement », soupire Joseph Guichard. C’est de temps dont manque en effet le libraire-papetier-cartier-kiosquier du 35  rue des Maronites.




De fait, tout se vend au détail ici : du livre scolaire au dernier ouvrage de vulgarisation sur le boson de Higgs ; du dernier stylo dont rêvent les princesses de sept ans aux agendas ornés d’une couverture ouvragée qu’affectionnent les amoureux du papier ; du jeu à gratter au jeu à cocher de ceux qui rêvent aux grandes joies du hasard, surtout le vendredi ; des cartes d’anniversaire au papier-cadeau quand il s’agit d’agrémenter un petit cadeau ; de Charlie Hebdo à la revue de philosophie en passant par la presse enfantine pour le petit dernier, même dans sa poussette. Si vous cherchez bien dans les 60 m2 de la boutique, vous trouverez peut-être quelques jouets perdus dans les multiples rayonnages.




Toutes ces activités drainent des clientèles différentes mais complémentaires pour faire tourner la librairie. La presse, sa première ressource financière, fait venir la clientèle. Quand l’école maternelle des Maronites a fermé, c’est autant de parents qui ne venaient plus acheter leur quotidien. « Ça nous a fait un coup dur sur l’instant », souligne Joseph Guichard. La baisse fut longue à recouvrer. Seconde brèche dans les ventes de la librairie : « la fermeture de la Cité nous a posé énormément de soucis car on a perdu la clientèle d’une grosse partie de la rue des Couronnes. On a mis plusieurs mois, voire plusieurs années à nous en remettre », se souvient-il. Ces clients ne traversaient plus la résidence du Pressoir.




Pour pallier ces pertes, la librairie étoffe ses produits et ses services. Il est toujours possible d’y commander les ouvrages les plus improbables, y compris en anglais, par email et pour l’établissement scolaire du quartier dans le cadre d’ensembles uniques.  

Peu après la pose de la clôture, la librairie est aussi devenue un point-relais pour les colis. « Les gens ont pris l’habitude de commander et de se faire livrer ici. Certains ont déménagé, mais ils continuent de se faire livrer ici parce qu’ils nous trouvent sympathiques ». Il faut de même s’adapter à l’ère du temps. Auparavant, il y avait deux pics dans l’année : lors de la rentrée scolaire et à Noël. « C’est une période où l’on travaillait énormément auparavant. Les gens offraient des stylos et de la belle papeterie ». Aujourd’hui, le seul mois de septembre nécessite la présence de deux personnes. La population du quartier a changé, et Joseph Guichard en est le premier témoin : plus jeune, plus aisée ; c’est ainsi qu’il la perçoit.

Il s’adapte et ne regrette rien. Quand il a acheté il y a vingt ans, il habitait en banlieue et cherchait à acquérir une librairie. Les précédents propriétaires changeaient d’activité, le potentiel de la librairie et sa surface lui convenaient ; l’affaire fut conclue en juillet 1993. Joseph Guichard n’a pas immédiatement vu que sa boutique était accolée à la résidence du Pressoir, qu’il continue d’appeler la Cité même s’il ne la connaissait pas avant la vente des appartements aux locataires qui les occupaient. Une fois la résidence et ses jardins découverts, il aurait bien aimé y acheter un appartement. Mais il y a des priorités, et la librairie en était une. Cependant, il apprécie cet environnement et cette ambiance qu’il ne retrouve pas dans le quartier où il habite.




Les habitants, eux, continuent de venir : 30% environ de sa clientèle est issue de la résidence. Il connaît chacun d’entre eux, l’accueille par son nom, sait quels sont ses goûts, lui demande des nouvelles de la famille, le tout avec un sourire dont il ne se départit jamais, même lors des pics de fréquentation, le samedi matin par exemple.

La librairie des Maronites est ouverte du lundi au vendredi, de 7h30 à 19h avec une pause entre 13h et 15h, et le samedi, de 7h30 à 12h30.

Pascale
Photos : Séraline, sauf mention particulière
Avec l'aimable participation de Fiona, Luna.

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